Page:Aristophane - Théâtre 1889 tome 2.djvu/491

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CARION.

Eh ! parbleu non, mais c’est un merdophage.

LA FEMME DE CHRÉMYLE.

Ah, misérable !

CARION.

J’ai pourtant eu peur, et je me suis enfoncé dans mon lit ; ce dieu, d’un air grand et plein de majesté, a fait la ronde autour de tous les malades, en visitant et en considérant le mal de chacun. Un esclave lui a apporté un mortier de marbre, un pilon et une petite boîte.

LA FEMME DE CHRÉMYLE.

De marbre aussi ?

CARION.

Hé morbleu non ; la boîte n’était pas de marbre.

LA FEMME DE CHRÉMYLE.

Mais, coquin, comment pouvais-tu voir tout cela, puisque tu t’étais caché dans ton lit ?

CARION.

Je voyais tout au travers de mon manteau, car il a d’assez beaux trous. La première chose qu’a faite le dieu, ça a été de broyer des drogues pour les yeux de Néoclidès ; il a donc pris trois têtes d’ail de Ténos et les a pilées dans le mortier, en y mêlant du suc de silphium et de lentisque, il a arrosé le tout de vinaigre sphettien ; puis il lui en a frotté le dedans des paupières, afin que la douleur fût plus cuisante. Néoclidès s’est mis à crier de toute sa force et à vouloir s’enfuir, mais Esculape lui a dit en riant : « Demeure ici, je veux t’ôter, à l’aide de mes soins, la possibilité d’anéantir par tes serments les ordonnances du peuple. »