Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/257

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de ne demander aucun service à personne, ou au moins de ne s’y résoudre qu’avec peine, et d’être toujours prêt à obliger les autres ; de se conduire avec fierté envers ceux qui sont constitués en dignité, ou qui sont comblés des faveurs de la fortune, tandis qu’il se montre doux et traitable envers ceux qui sont dans une condition médiocre : car il est difficile d’obtenir la supériorité sur les premiers, il y faut de la dignité ; au lieu que cela est facile avec les autres. La hauteur même, à l’égard des puissants, n’est pas sans quelque générosité ; elle devient grossièreté et rudesse à l’égard des personnes d’un état humble, comme l’abus de la force envers le faible. Il convient encore à l’homme vraiment magnanime de ne pas rechercher toutes les occasions d’obtenir des honneurs, et surtout, là où d’autres occupent le premier rang, de ne montrer de l’activité et de l’empressement que dans les occasions où il y a beaucoup de considération à obtenir, ou quelque chose de grand à exécuter ; en un mot, de ne faire que des choses importantes et qui procurent de la gloire.

Il doit nécessairement être ami prononcé et ennemi déclaré, car la dissimulation est l’indice de la crainte ; se montrer plus soigneux de la vérité que de l’opinion, et enfin agir et parler sans feinte et sans détours ; car c’est le propre d’une âme élevée. Aussi s’exprime-t-il toujours avec une noble franchise et avec une grande sincérité, à moins qu’il ne veuille avoir recours à l’ironie, ce qui lui arrive souvent avec le vulgaire.