Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/295

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tout le monde en peut juger sans beaucoup de raisonnements ; et, puisque c’est dans le milieu que se trouve l’égalité, ce sera là aussi que se trouvera la justice, Or l’égalité ne peut exister qu’entre deux termes au moins : le juste doit donc nécessairement être un milieu, une égalité par rapport à des choses et à des personnes. Comme milieu, il se rapporte à de certaines choses qui sont le plus et le moins ; comme égal, il suppose deux termes ; enfin, comme juste, il se rapporte à des personnes. Par conséquent, la notion du juste comprend au moins quatre termes : car cette notion, appliquée aux personnes, en suppose deux ; et, appliquée aux choses, elle en suppose aussi deux. Et la même égalité devra se trouver dans les choses et dans les personnes ; car le même rapport qui existe entre les choses, doit exister aussi entre les personnes[1], puisque, s’il n’y a pas égalité entre celles-ci, elles ne devront pas posséder des choses égales.

Mais c’est précisément là qu’est la source des querelles et des plaintes, lorsque ceux qui sont égaux n’ont pas, ou ne peuvent pas obtenir des avantages égaux, ou lorsque, à mérite inégal, ils en obtiennent d’égaux. Cela devient évident par la comparaison du rang et de la dignité entre les personnes. Car on convient généralement que, dans

  1. Par exemple : « Si la valeur d’Achille est deux fois plus grande que celle d’Ajax, il faudra qu’Achille ait une récompense deux fois plus considérable. » (Paraphr.)