Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/329

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nérale, quoique ses décisions ne soient pas susceptibles d’une extrême précision, elle embrasse ce qui arrive le plus communément, sans se dissimuler l’erreur [qui peut résulter de ses décisions], et elle n’en est pas moins ce qu’elle doit être ; car l’erreur ne vient ni de la loi, ni du législateur, mais de la nature même de la chose, puisque la matière des actions humaines est précisément telle.

Lors donc que la loi s’explique d’une manière générale, et qu’il se rencontre des circonstances auxquelles, ces expressions générales ne peuvent pas s’appliquer, alors on a raison de suppléer ce que le législateur a omis, ou de rectifier l’erreur qui résulte de ses expressions trop générales, en interprétant ce qu’il dirait lui-même, s’il était présent, et ce qu’il aurait prescrit par sa loi, s’il avait eu connaissance du fait. Voilà pourquoi il y a une justice préférable à la justice rigoureuse dans tel cas particulier ; non pas à la justice absolue, mais à celle qui prononce en des termes absolus, qui [dans ce cas] sont une cause d’erreur ; et telle est précisément la nature de l’équité : elle remédie à l’inconvénient qui naît de la généralité de la loi. Car ce qui fait que tout n’est pas compris dans la loi, c’est qu’il y a des cas particuliers sur lesquels il est impossible qu’elle s’explique : en sorte qu’il faut avoir recours à une décision particulière[1] ; car la règle de ce qui est indéterminé doit être elle-même indéterminée. Comme ces règles de

  1. À un décret, ou ordonnance (ψήφισμα).