Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/395

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comme nous l’avons remarqué précédemment : tels sont la victoire, le profit, l’honneur). Or, on n’est pas blâmable pour aimer toutes ces choses, et celles qui ne sont ni désirables, ni odieuses, ni pour les désirer et y trouver quelque satisfaction ; mais on l’est par la manière dont on en est touché, et pour les désirer à l’excès. Aussi blâme-t-on tous ceux qui, sans écouter la raison, recherchent avec une ardeur extrême quelqu’une de ces choses naturellement désirables et estimables, comme les honneurs, et qui y attachent plus d’importance qu’il ne faut. L’affection d’un père pour ses enfants, et la tendresse filiale sont même dans ce cas : car sans doute ce sont là des biens, et on loue ceux qui en sont touchés. Il peut, cependant, y avoir de l’excès dans de pareils sentiments, si, comme Niobé, on les porte jusqu’à manquer de respect pour les dieux, ou si, à l’exemple de Satyrus, qui fut surnommé Philopator, on porte jusqu’à l’extravagance[1] la tendresse pour un père. Il n’y a pourtant là

  1. L’auteur de la paraphrase, attribuée à Andronicus, a mal interprété cet endroit, en supposant que Satyrus avait donné à son père le surnom de Dieu. Un autre scholiaste, cité par Mr  Zell, nous apprend, on ne sait sur quelle autorité, que la tendresse excessive de ce Satyrus pour son père, était fondée sur des motifs extrêmement peu honorables. Peut-être est-il question ici d’un tyran du Bosphore, ainsi nommé, et qui avait vécu peu de temps avant la naissance de notre philosophe. (Voyez Diodore de Sicile, l. 14, § 93.) Ce Satyrus était fils de Spartacus, et eut pour successeur et pour fils Leucon, dont Démosthène fait mention dans sa Harangue sur Leptine.