Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/432

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activité imprimée à la partie de notre organisation qui est demeurée saine, cette activité même semble, en effet, accompagnée d’un sentiment agréable. Et, d’un autre côté, nous sommes portés à trouver un charme puissant à tout ce qui donne à une nature telle que la nôtre, occasion d’exercer cette sorte d’activité.

Cependant, les mêmes choses ne peuvent pas toujours nous plaire, parce que notre nature n’est pas simple, et qu’il y entre des éléments en vertu desquels nous sommes corruptibles et périssables ; de sorte que, quand l’une [des parties qui la composent] exerce son activité naturelle de la manière qui lui est propre, ce qu’elle fait est, pour ainsi dire, contraire à la nature [par rapport à l’autre partie] ; et lorsqu’il y a équilibre [entre leurs actions], il semble que ce que nous faisons ne nous cause ni peine, ni plaisir. C’est qu’en effet, s’il y avait quelque être dont la nature fût entièrement simple, la même activité, purement contemplative, serait toujours pour lui la source des plus vifs plaisirs. Voilà pourquoi Dieu jouit éternellement d’une volupté simple et pure : car son activité ne s’exerce pas seulement dans le mouvement, elle subsiste également dans la plus parfaite immobilité, et la volupté est plutôt dans le repos [dans une sorte de quiétude] que dans le mouvement. Mais notre imperfection est cause qu’en tout, le changement a des charmes, comme dit le poète[1] ; car, comme

  1. Voyez l’Oreste d’Euripide, (vs. 234). Aristote cite encore