Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/463

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Quant aux gens vicieux, ils n’ont ni constance ni fermeté dans leurs résolutions, puisqu’ils ne sauraient demeurer semblables à eux-mêmes ; et leurs attachements ne durent que très-peu de temps, n’étant fondés que sur le plaisir qu’ils trouvent dans la perversité les uns des autres. Les attachements fondés sur l’utilité ou l’agrément, ont plus de durée ; ils subsistent au moins tout le temps que les amis peuvent réciproquement se procurer des plaisirs, ou se rendre des services. Mais l’amitié fondée sur l’utilité, naît plutôt de l’opposition ou du contraste, par exemple, entre un homme pauvre et un homme riche, entre le savant et l’ignorant. Car celui qui reconnaît qu’une chose lui manque, est porté à la désirer, et à donner quelque autre chose en échange. On pourrait ranger dans cette classe, l’amant et l’aimé, le beau et le laid ; et c’est ce qui fait quelquefois paraître les amoureux ridicules, quand ils ont la prétention d’être aimés comme ils aiment ; prétention peut-être assez fondée chez les personnes qui sont également aimables, mais ridicule dans celles qui n’ont rien de propre à justifier un pareil sentiment.

Peut-être, au reste, les contraires ne sont-ils attirés l’un vers l’autre que par accident, et non pas en vertu de leur nature ; peut-être la tendance la plus naturelle est-elle celle qui porte les êtres vers un certain milieu, puisque c’est là qu’est le bien ou le bon proprement dit. Par exemple, le sec ne tend pas à devenir humide, mais à un état intermédiaire ; il en est de même du chaud, et des