Page:Aristote - Morale, Thurot, 1823.djvu/465

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entre les citoyens, en général, et entre les membres d’une association particulière. Il en est ainsi des autres espèces d’amitiés.

L’injustice ne sera pas non plus la même dans chacune de ces circonstances ; elle sera plus grande à l’égard de ceux qui sont plus amis. Par exemple, on sera plus coupable de faire éprouver une perte d’argent à un ami de plaisir, qu’à un autre citoyen ; de ne pas secourir un frère, plutôt qu’un étranger ; la violence envers un père sera plus criminelle qu’envers un autre individu. Et la justice a naturellement des droits plus étendus, à mesure que l’amitié est plus intime, parce qu’on vit au milieu, des mêmes objets, et qu’il y a égalité sous tous les rapports. D’ailleurs, toutes les associations ressemblent à la société politique ; elles tendent à la satisfaction de quelque intérêt, et à procurer quelque avantage pour la vie. Aussi, la société civile semble-t-elle n’avoir été établie dans le principe, et ne se maintenir, qu’en vue de l’intérêt commun ; il est le but que se proposent les législateurs, et ils déclarent juste ce qui y est conforme[1].

Or, les autres associations tendent également à quelque partie de cet intérêt commun : ainsi, ceux qui s’embarquent ont pour but l’intérêt résultant de la navigation, qui est de se procurer des richesses, ou quelque autre chose avantageuse ; les soldats ont en vue l’intérêt qui résulte de la guerre, soit l’acquisition des richesses, soit la gloire de

  1. Voyez la Politique, l. 3, c. 4, § 2.