Page:Aristote - Poétique et Rhétorique, trad. Ruelle.djvu/132

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monde, ou par le plus grand nombre, ou par les gens de bien ou les hommes de sens.

IX. Les honneurs sont les signes d’une réputation de libéralité. Sont honorés par-dessus tout, et avec raison, ceux qui ont fait du bien ; du reste, on honore aussi celui qui est en situation d’en faire. La libéralité s’exerce en vue du salut et de tout ce qui fait vivre, ou bien de la richesse, ou, encore, de quelqu’un des autres biens dont l’acquisition n’est pas facile, soit d’une manière absolue, soit dans telle circonstance, soit dans tel moment ; car beaucoup de gens obtiennent des honneurs pour des motifs qui paraissent de mince importance ; mais cela tient aux lieux et aux circonstances. Les variétés d’honneurs sont les sacrifices, les inscriptions métriques et non métriques, les récompenses, la préséance, les tombeaux, les images, la subsistance publique ; les usages des barbares, tels que les prosternations et le soin qu’on y prend de s’effacer. Les dons ont partout un caractère honorifique ; et en effet, le don est l’abandon d’un bien possédé et un signe d’honneur rendu. Voilà pourquoi les gens cupides et les ambitieux recherchent les dons. Le don a, pour les uns et les autres, de quoi répondre à leurs besoins. En effet, le don est une possession, ce que convoitant les gens cupides ; et il a en soi quelque chose d’honorifique, ce que convoitent les ambitieux.

X. La qualité principale du corps, c’est la santé ; or il s’agit de la santé dans ce sens où l’on dit que sont exempts de maladie des gens qui gardent l’usage de leur corps ; car beaucoup de gens se portent bien, comme on le dit d’Hérodicus[1], lesquels ne seraient

  1. Hérodicus de Sélymbrie, médecin mentionné par Platon (Phèdre et République) et par Plutarque (De sera num. vind.,§ 18).