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1866, 1867). D’autre part, si M. Thurot a admis quelques corrections proposées par Vahlen, il en a rejeté le plus grand nombre. (Observations philologiques sur la Poétique d’Aristote, dans la Revue archéologique, t. II, 1863.)

M. Egger en a donné, en 1849, une édition avec traduction française et commentaire, dans son Essai sur l’histoire de la critique chez les Grecs. Cette édition a été réimprimée plusieurs fois, notamment en 1876, avec des additions destinées à la mettre au courant des derniers travaux de l’érudition. C’est le texte de Bekker, modifié en quelques endroits ; nous reviendrons tout à l’heure sur la traduction qui l’accompagne. Le savant helléniste est assurément le Français qui a le plus contribué à l’éclaircissement comme à l’interprétation de la Poétique. C’est aussi l’éditeur et traducteur de ce traité auquel notre travail doit le plus, bien qu’il ait été, comme la Rhétorique, exécuté sur le texte même d’Aristote. Nos arguments analytiques, notamment, sont empruntés presque textuellement à la traduction de M. Egger.

Il est inutile d’insister sur l’importance de la Poétique. Elle a été mise en relief par Daniel Heinsius, dont l’édition (1611, puis 1643) a troublé plutôt que rectifié l’ordre du texte, mais qui en a parlé avec une admiration éclairée autant qu’enthousiaste. Bayle, dans son Dictionnaire critique (art. Aristote) le met au-dessus de tous les ouvrages philosophiques du Stagirite. Rapin a dit : « La Poétique n’est, à proprement parler, que la nature mise en pratique et le bon sens mis en principe. » (Réflexions sur l’éloquence, la poétique, l’histoire et la philosophie, etc., 1693.) Antonio Lullo, critique espagnol cité dans la notice bibliographique que Harlès a placée en tête de son édition (1780), formulait son jugement en termes qui peuvent se traduire ainsi : « Aristote a un goût plus sûr que tous les poètes, et, mieux que tous les poètes, il a compris ce qui convient et ne convient pas dans une œuvre poétique. » (De Orator., I. III, ch. V.)

Ce chef-d’œuvre d’esthétique littéraire devait avoir ses détracteurs. Citons entre autres Ch. Perrault, l’auteur du trop fameux Parallèle des anciens et des modernes (1688-1698), pour qui le passage relatif à la purgation des