Page:Aristote - Poétique et Rhétorique, trad. Ruelle.djvu/306

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ne pas avoir de chien[1], conclure que le chien est honorable ; ou de dire qu’Hermès est par excellence le dieu communicatif, libéral, attendu que, seul, Hermès est appelé le dieu commun[2] ; ou que le logos[3] est ce qu’il y a de plus important, attendu que les gens de bien sont qualifiés non pas dignes de richesses, mais dignes d’estime. En effet, l’expression λόγου ἄξιος a plus d’un sens.

III. Un autre lieu, c’est de parler en réunissant des choses distinctes et en distinguant des choses réunies ; en effet, comme il y a souvent une apparence d’identité dans ce qui n’est pas identique, il faut employer le sens dont on peut tirer le meilleur parti. Tel est ce raisonnement d’Euthydème[4] : par exemple, on sait qu’une trirème est au Pirée, puisque l’on connaît chacun des deux ; quand on sait les lettres, on connaît le vers, car le vers est la même chose[5] ; dire que, comme la double dose rend malade, la dose simple n’est pas non plus favorable à la santé, car il serait étrange que deux choses bonnes devinssent une chose mauvaise. Voilà pour l’enthymème de réfutation. Voici maintenant pour l’enthymème démonstratif. Il est vrai, dira-t-on, qu’un bien unique ne peut devenir deux maux ; mais tout ce lieu est entaché de paralogisme. Citons encore le mot de Polycrate sur Thrasybule : « Il anéantit trente tyrans. » On voit qu’il procède par réunion ; — ou le mot de Théodecte dans Oreste, qui procède par division :

  1. Être eunuque,
  2. Comme résidant et agissant au ciel, sur terre et aux enfers : Superis deorum gratus et imis (Horace, Odes, I, X, 19-20). Jeu de mots sur κοινωνικός, κοινός.
  3. Λόγος, qui signifie raison et estime, sans compter son acception de discours.
  4. Cp. Sophist. elench. ch. 20.
  5. Que les lettres dont il se compose.