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tions[1], la tragédie y a mis un terme, puisqu’elle avait revêtu sa forme naturelle[2].

XIV. Vint ensuite Eschyle qui, le premier, porta le nombre des acteurs de un à deux, amoindrit la fonction du chœur et donna le premier rôle au discours parlé. Sophocle institua trois acteurs et la mise en scène.

XV. Quant à l’importance de la tragédie, partie de fables légères et d’un langage plaisant, vu le caractère satirique de son origine, elle mit du temps à prendre de la gravité, et son mètre, de tétramètre, devint ïambique ; car, primitivement, on employait le tétramètre, attendu que cette forme poétique est celle de la satire et plus propre à la danse. Puis, lorsque vint le langage parlé[3], la nature trouva elle-même le mètre qui lui convenait ; car le mètre le plus apte au langage, c’est l’ïambe ; et la preuve, c’est que, dans la conversation, nous frisons très souvent des ïambes, des hexamètres rarement et seulement lorsque l’on quitte le ton de la conversation.

XVI. Puis on parle encore de quantité d’épisodes et

  1. Résumé d’une note de G. Hermann. — 1re forme de la tragédie : La tragédie est issue de ceux qui chantaient le dithyrambe. — 2e forme : Improvisations satiriques. — 3e : Thepsis, inventeur du drame tragique, comportant un personnage unique qui dialoguait avec le chœur. — 4e : Phrynichus, disciple de Thepsis, introduit les personnages de femmes. — 5e : Pratinas, de Phlionte, inventeur du drame satirique. — 6e : Eschyle produit un second personnage ; mise en scène plus brillante ; plus grande place donnée au mètre ïambique, au détriment du chant chorique. — 7e : Sophocle institue un troisième personnage et ajoute encore à l’éclat de la mise en scène. — 8e : Introduction d’un quatrième personnage, ce qu’on appelait παραχορήγημα.
  2. Traduction de M. Egger : « La tragédie se développa peu à peu, l’art du poète aidant à ses progrès naturels, et elle ne cessa de se transformer que lorsqu’elle eut trouvé son propre génie. »
  3. Lorsque le monologue, puis le dialogue, ne fut plus exclusivement chanté.