Page:Aristote - Poétique et Rhétorique, trad. Ruelle.djvu/99

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

les autres points, il n’est certes pas nécessaire qu’elle possède cet accessoire[1].

VIII. Ajoutons qu’elle a toutes les ressources qui appartiennent à l’épopée (puisqu’elle dispose du mètre), et en outre, ce qui n’est pas de mince importance, la musique et le spectacle, au moyen duquel les jouissances sont aussi vives que possible. Elle trouve encore une puissante ressource dans la reconnaissance et dans les actions (qu’elle déroule).

IX. (Elle est supérieure) aussi en ce que le but de l’imitation y est atteint dans une étendue moins considérable (que pour l’épopée) ; car ce qui est plus resserré donne plus de plaisir que ce que l’on répand sur une longue période de temps. J’entends par là si, par exemple, on composait l’Œdipe de Sophocle en autant de vers qu’il y en a dans l’Iliade.

X. De plus, l’imitation des poètes épiques est moins une, et la preuve, c’est que de n’importe quelle imitation épique on tire plusieurs tragédies ; c’est au point que, si l’on ne traite qu’une seule fable (dans l’épopée), ou bien elle est exposée brièvement, et alors l’œuvre parait écourtée, ou bien on s’accommode à la longueur que comporte ce mètre, et elle paraît délayée. Je citerai comme exemple… Maintenant, si (l’épopée) se compose de plusieurs fables, comme l’Iliade, elle renferme un grand nombre de parties, ainsi que l’Odyssée, qui ont chacune leur étendue propre ; et cependant la constitution de ces poèmes est aussi parfaite que possible, et ils sont l’imitation d’une action unique.

XI. Si, par conséquent (la tragédie) l’emporte par tous ces avantages et, en outre, par la fonction propre de cet art (car les tragédies ne procurent pas un plaisir quelconque, mais bien celui que nous avons dit), il

  1. Le mouvement, les gestes.