Page:Aristote Metaphysique 1840 1.djvu/64

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est impossible. Il y a nécessairement une substance déterminée ; et de là un argument invincible contre la possibilité de l’existence simultanée, dans le même individu, des contradictoires et des contraires.

Une autre conséquence de ces systèmes, c’est que tout est toute chose, et qu’il n’existe qu’une seule chose. Car, si toutes les affirmations contradictoires sont vraies, si, comme le dit Protagoras, l’opinion de chaque homme constitue la vérité, l’homme est une galère, la galère est un homme ; et le monde est encore ce chaos, ce mélange des éléments, cette primitive confusion dont parlait Anaxagore. Enfin les sceptiques se sont chargés eux-mêmes de détruire leur système. Ils affirment que tout est vrai ou que tout est faux ; mais alors, de deux choses l’une, ou bien leur assertion n’admet aucune exception, et dans ce cas elle se détruit elle-même, ou bien la seule chose vraie, c’est cette assertion que tout est faux, que tout est vrai ; or, c’est admettre qu’il y a un principe vrai, tout en prétendant qu’il n’y a ni vérité ni fausseté (car si tout est vrai tout est faux, et réciproquement) ; c’est élever d’une main, pour renverser de l’autre. Une chose fort consolante du reste, comme le remarque Aristote, c’est qu’il est beaucoup plus facile de proclamer le scepticisme que de le mettre en pratique. Ceux qui, de son temps, refusaient spéculativement d’admettre la distinction du vrai et du faux, n’en continuaient pas moins de vaquer à leurs affaires ; ils allaient à Mégare, ils évitaient le précipice où ils eussent pu tomber : donnant par là un démenti formel à leurs principes.

Cependant, malgré l’absurdité de toutes ces doctri-