Page:Arnould - Quelques poètes, 1907.djvu/140

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par la boutade inédite que nous avons citée de lui, et qui lui échappa au siège de la Rochelle[1].

Nous savons, d’ailleurs, que Malherbe ne pouvait être rangé parmi les chauds catholiques de son temps, quoiqu’il prétendît avoir fait comme ligueur, dans sa jeunesse, le coup de feu contre Sully. Il s’acquittait strictement de ses devoirs religieux, car il allait à la messe, et même à la grand’messe, ainsi que le témoigne une autre anecdote de Conrart. Un dimanche, Racan arrive à l’église après lui et le trouve à la porte. « Ne voulez-vous pas entrer plus avant, lui dit-il, pour entendre la messe ? » A quoy M. de Malherbe répondit brusquement, selon sa coutume : « Pensez-vous qu’une grande messe ne porte pas plus loin qu’une petite ? » Son cœur n’était point engagé dans sa religion, mais plutôt son bon sens et surtout son goût de la bienséance. Il aimait à répéter que « la religion des honnêtes gens est celle de leur prince ». Il était catholique parce qu’il était royaliste, et l’un et l’autre par esprit d’ordre. Nul doute que, venu à une autre époque plus sceptique, il n’eût grossi le nombre des incroyants, ou tout au moins des indifférents.

Le sentiment le plus vif de Malherbe paraît avoir été l’horreur de Ronsard. Il le détestait, il

  1. P. 105.