Page:Arnould - Quelques poètes, 1907.djvu/182

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le regarder parmi les bois taillis. Quand sa vue se porte vers la droite, franchissant une sorte de passe de verdure, elle se repose à peu de distance sur l’entremêlement gai des peupliers verts et des blanches maisons du bourg de Saint-Pater ; si elle s’élance vers la gauche, elle remonte de prairies en prairies jusqu’au lointain clocher de Neuillé-Pont-Pierre qui apparaît dans les arbres, au milieu de l’horizon élargi. Ce tableau gracieux et rustique va s’emparer à jamais de l’imagination de l’enfant et former chez lui, comme il arrive, la première toile éternellement fraîche du sentiment et de la mémoire.

Au sein de cette solitude on lui enseigne le catéchisme et ses prières, qu’il oublie ; la grammaire, la logique et la rhétorique, qui le font bâiller. On lui apprend encore à jouer du luth, qu’il ne peut accorder parce qu’il a l’oreille et la voix fausses. Il ne possède qu’un seul goût véritable : il retient les vers français après les avoir une fois entendus. Dans les rares jours où ses parents se trouvent réunis, il les voit s’essayer ensemble à composer quelques vers et les écrire sur un gros volume, qu’il devait plus tard emporter avec lui comme un talisman : en le feuilletant, il trouvait que les poésies de sa mère étaient bien supérieures à celles du maréchal de camp.

Quelquefois il descend au bourg pour y servir de parrain à des filleuls de chair ou de bronze, aux enfants ou aux cloches de Saint-Pater…