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QUELQUES POÈTES

Les Stances nous apparaissent décidément comme la plus pure floraison poétique de la glèbe de France. Racan nous a donné le premier fragment, et qui est resté l’un des seuls, de nos Géorgiques françaises.


II

C’est bien, en effet, le souvenir de Virgile dans ses Géorgiques qu’évoquent ces vers profonds et un peu tristes qui forment une sorte de variation moderne du fameux

Fortunatus et ille deos qui novit agrestes !

Virgile célèbre bien le bonheur des laboureurs, mais en des termes qui ne font pas envie, tellement il excelle à montrer la dureté de cette condition. Il aspire lui-même aux champs, mais il commence par déclarer que ce qu’il aimerait avant tout, c’est à percer les secrets de la nature, et c’est seulement dans le cas où il échouera, qu’il ira ensevelir sans gloire dans la vie rustique sa faillite intellectuelle[1]. Cet amour des champs, panthéiste et pessimiste, est singulièrement intime et moderne. Qu’il nous suffise de retenir que la joie en est absente.

  1. Géorgiques, II, 475 et s.