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PENSÉE FRANÇAISE

battent encore bien plus que par son habileté, une puissance qui fait trembler jusqu’à l’archevêché. Et que M. Langlois se soit permis de plaisanter trop vivement le mouton, cela peut bien faire croire à quelques-uns que M. Langlois veut ridiculiser l’Agneau de Dieu, mais cela ne justifie personne de classer parmi les antichrétiens ceux qui déplorent, ou même ridiculisent, l’usage que l’on a fait jusqu’ici de l’agneau dans nos processions patriotiques.

En faisant de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, à la dernière session du parlement de Québec, « l’union des catholiques de langue française sur le terrain national », on a, pour atteindre deux cents francs-maçons qui, chose bizarre, sont légalement des catholiques et pourraient comme jadis M. Sauvalle faire condamner par les tribunaux quiconque les traiterait de non-catholiques, on a, dis-je, exclu de la race plusieurs milliers de protestants français, nés pour la plupart dans la foi protestante et qui, soyons donc une bonne fois assez loyaux pour le reconnaître, ont d’autant plus de mérite de rester français quand ils le font qu’une opinion publique hostile les pousse malgré eux du côté anglais. J’avais moi-même, deux ans auparavant, fait fermer la Société aux adhérents des « sectes poursuivant un but contraire à celui de la Société » — et parmi ces sectes il était expressément entendu que nous comprenions la maçonnerie. Mais je ne voyais pas la nécessité de la nouvelle expulsion. Je ne la trouvais justifiée ni par le nombre des protestants canadiens-français ni par leur attitude, absolument indifférente, envers la Société. Je craignais qu’elle ne parût inspirée par la peur et qu’on n’y vit de la part de la Société un signe de faiblesse plutôt qu’un signe de force. Je croyais aussi avec le cardinal Richelieu que celui-là est un mauvais Français qui préfère à un huguenot français un catholique espagnol, et