Page:Audiat - Bernard Palissy : étude sur sa vie et ses travaux.djvu/109

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parvenu à mettre sur la faïence ; qu’il nous eût fait connaître les difficultés qu’il a dû éprouver pour faire tenir sur une pâte, presque exempte de chaux et très-fortement cuite, de semblables émaux sans qu’ils écaillent ; qu’il eût décrit la composition de chacun de ses émaux, la forme de ses fours, etc., comme il eût fait alors autrement que ses contemporains, comme il eût devancé son siècle par cette sagesse et avancé l’art de la faïence par sa communication, Bernard Palissy eût été un grand homme et un homme utile. » Si Palissy eût composé un Traité des arts céramiques, et que, arrenté par le gouvernement d’alors, il eût été sûr de ne jamais manquer de pain, peut-être lui pourrait-on adresser d’aussi injustes blâmes. Ennemi de la théorie, il n’enseignait pas ; il montrait la pratique. Il avait des élèves, des disciples, des ouvriers ; que n’ont-ils transmis les procédés de fabrication ? Ne confondons pas l’utile avec le beau. L’art n’est pas l’industrie. À quoi peuvent servir les plats de Palissy ? L’humanité eût-elle beaucoup progressé, si elle eût connu deux siècles plus tôt comment il faisait « tenir, sur une pâte presque exempte de chaux et très-fortement cuite, de semblables émaux sans qu’ils écaillent ? » Ce serait un anachronisme que de supposer à maître Bernard cet amour platonique de la science, si vanté et si rare même de nos jours, une passion désintéressée de l’art pour l’art, la recherche de l’idéal, beau mot qui sert de prétexte à tant de déclamations. Il veut être utile, mais il ne faut pas oublier qu’il cherchait dans l’émail un moyen de vivre et d’entretenir sa famille.