Page:Audiat - Bernard Palissy : étude sur sa vie et ses travaux.djvu/149

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que le corps entier, tête et membres, fût réformé. Reformatio in capite et in membris. Comment cette phrase devint-elle un cri de guerre, un signe de ralliement contre le catholicisme ? Comment tourna-t-on contre lui son propre aveu, et se fit-on une arme de ce qu’il préparait pour se guérir ? C’est ce qu’on comprendra en voyant avec quelle facilité l’esprit humain passe des idées de réforme à celle de révolution. Les premiers prédicants respectèrent le dogme. Ce qu’ils poursuivaient de leurs invectives, c’étaient les scandales qui sont de tous temps, et les vices propres à l’époque. Plaintes contre les abus, déclamations contre le clergé, voilà ce qu’on entend au début. Le catholicisme n’est pas en cause. Ils n’attaquent ni les sacrements, ni Jésus-Christ, ni même l’autorité du pape. On veut une réformation, non une rénovation. C’est un retour vers le passé plutôt qu’un élan vers l’avenir. Aussi, au commencement, beaucoup ne virent, dans le protestantisme, qu’un catholicisme débarrassé de la rouille des siècles et des abus qui s’y étaient engendrés. Ils auraient pu dire ce que Jeanne d’Albret, reine de Navarre, écrivait, le 18 août 1563, au cardinal d’Armagnac : « Je n’ay point entrepris de planter nouvelle religion en mon païs, sinon y restaurer les ruines de l’ancienne. »

Dès 1517, année où Luther tonna contre les indulgences, dès 1512 même, époque où Jacques Lefèbre d’Étaples prêchait la justification par la foi seule, et 1535, date de la publication de l'Institution chrétienne de Jean Calvin, la rupture avec l’Église établie était sans doute flagrante ; mais pour ceux-là seule-