Page:Audoux - Douce Lumiere.djvu/183

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

allées sombres et tortueuses, elle reste à errer sans fin.

Tensia ne devait jamais plus danser ni rire dans le logement de son mari. Le jour même de son retour à Paris elle s’était tuée en tombant de cheval dans une allée du Bois.

Églantine et Jacques se sont approchés ensemble du lit de parade sur lequel elle était exposée, vêtue d’une robe tissée d’argent et d’or, et chaussée de fins souliers brillants. Elle gardait une rageuse audace dans ses yeux ouverts et à peine ternis. Sur ce visage si beau il n’y avait aucune douceur, mais dans les traits, tendus vers on ne savait quoi, il y avait un tel désir de vivre, que l’idée vint à Églantine que tout n’était pas fini. Pour s’en assurer elle toucha la main raidie. Tout aussitôt un courant de glace lui monta jusqu’à l’épaule. Ce fut comme si Tensia, impatientée, lui disait : « Mais si ! Vous voyez bien que tout est fini. » Elle recula, ne pouvant supporter ce regard fixe qui semblait un reproche à tout vivant de l’avoir laissée mourir.

La blessure à la tête, qui avait eu raison d’elle, était dissimulée par une sorte de casque, formant couronne, d’où sortaient ses magnifiques boucles brunes cachant en