Page:Audoux - Douce Lumiere.djvu/199

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aux arbres. Dans l’air qui fraîchit une paix vient à eux. Les bruits de la ville commencent de s’assourdir. Aucun moineau ne pépie dans les branches, et les hirondelles ont cessé de voler. Seules les chauve-souris passent rapides au-dessus de leur tête, et parfois si près de leur front qu’ils craignent pour leurs yeux. De grands papillons de nuit les frôlent, attirés eux aussi par la lampe basse qui veille au fond de la pièce. Et, venant de la gouttière, un chat — pas toujours le même — se glisse à pas doux entre les barreaux du balcon et quémande une caresse avant de se coucher à leurs pieds. À cause du bruissement continu des arbres d’en bas, ils sont comme dans une forêt où ne viendraient à eux que des bêtes libres et inoffensives.

Face au nord, ils suivent des yeux la ligne claire de l’horizon qui contourne lentement la ville et remonte vers l’est. Encore quelques heures et le jour renaîtra. Et dans le silence qui augmente, Églantine et Jacques, immobiles et proches l’un de l’autre au point de se toucher, s’oublient mutuellement et s’enfoncent dans l’espace, à la poursuite de leurs rêves douloureux.