Page:Audoux - L Atelier de Marie Claire.djvu/262

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pour meubler sa boutique Clément emportait de chez Mme Dalignac tout ce qu’il lui était possible d’emporter. Il disait seulement à sa tante :

— Je prends ça.

Elle riait de le voir si chargé, et devant mon air confus, elle disait tout heureuse :

— Laissez donc, ce qui est à moi est à lui.

À mes reproches Clément répondait :

— Elle laissera prendre cela aux autres, autant vaut-il que ce soit moi qui en profite.

De notre futur logement il n’était pas question. « L’arrière-boutique suffira », avait dit Clément. Et en deux autres phrases il avait désigné l’emplacement de notre mobilier. « Ici, un lit pour dormir, et là, une table pour manger. »

Cette arrière-boutique était humide et noire.

Jamais le soleil n’y avait pénétré et il s’en dégageait une odeur qui m’obligeait à m’en éloigner dès que j’y entrais.

Clément riait si fort de ma répugnance que je finissais par faire comme lui.

Rien ne le rebutait. Il lavait les murs, grattait le parquet et décorait sa boutique sans accepter aucun conseil.

Le soir, assis bien à l’aise entre sa tante et moi, il disait ses espoirs de richesse, et faisait des projets d’avenir. Maintenant qu’il avait une boutique il désirait une maison de campagne. Et bien souvent sur une carte des environs de Paris étalée sous la lampe, il suivait du bout de son crayon la Seine ou la Marne, à la recherche d’un endroit