Page:Audoux - La Fiancee.djvu/38

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une frayeur de cet arbre mort par leur faute, « C’est nous qui l’avons tué », disait Nestine. À cause de cela elle évitait de poser le pied dessus et Nestin prenait bien garde de le heurter avec le maillet. Cependant, tout au fond de l’eau, les racines du néflier continuaient à être luisantes et noires comme de belles anguilles bien vivantes. Puis, peu à peu, la souche elle-même, lavée et relavée par les pluies douces du printemps, se débarrassa de sa vase et de ses débris et montra sous le soleil de juin la même teinte de bronze clair que les nèfles mûres. Et voici qu’un jour de plein été, comme Nestin et Nestine arrivaient en courant pour chasser les gamins qui venaient chiper les noisettes, ils restèrent figés de surprise devant le néflier qu’ils croyaient mort. De chaque côté de la souche, bien à l’abri du noisetier touffu, deux pousses droites et vigoureuses s’élevaient hautes déjà de plus d’un demi-mètre et semblaient deux cornes, faisant la nique à Nestin et Nestine.

L’homme du pré qui ne s’étonnait pas pour si peu, leur dit en riant fort, selon son habitude :