Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/208

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pour le mettre en pièces et en avaler les parties charnues, laissant de côté les pattes et la carapace. Quand il eut fini, il s’envola vers ses petits et dégorgea devant eux.

Extrêmement vorace, il fait ventre de tout, sauf de végétaux ; même les plus puantes charognes ne lui répugnent pas, cependant il préfère du poisson frais, de jeunes oiseaux ou de petits quadrupèdes. Il suce tous les œufs qu’il peut trouver et en détruit ainsi un grand nombre, n’épargnant pas davantage les parents, s’ils sont faibles et sans défense. J’ai souvent vu de ces Goëlands attaquer une troupe de canards nageant aux côtés de leur mère. Celle-ci, quand ils étaient trop jeunes, prenait seule son vol, et les pauvres petits plongeaient ; mais souvent ils étaient capturés en reparaissant à la surface, à moins qu’ils ne se trouvassent parmi des joncs. La femelle de l’Eider est la seule de sa tribu qui, en pareille occasion, risque sa vie pour sauver sa famille : elle s’enlève de dessus l’eau, tandis que sa couvée disparaît au-dessous, et tient le Goëland en respect, jusqu’à ce que ses petits soient à l’abri sous quelque rocher ; ce n’est qu’alors qu’elle part dans une autre direction, laissant l’ennemi tout penaud digérer sa mortification à loisir. Mais lorsque la tendre mère est sur ses œufs et à découvert, le maraudeur l’assaille, la contraint de s’envoler, et pille son trésor, hélas ! sous ses yeux. Les jeunes tétraos deviennent aussi la proie de ce Goëland, qui leur donne la chasse sur les rocs couverts de mousse, et les dévore devant leurs parents ; enfin, il s’attache aux bancs de poissons pendant des