Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/300

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

terrains couverts d’eaux saumâtres. Elle préfère les ruisseaux qui serpentent sous les bois ombragés et dont les bords humides sont composés d’un sol vaseux ; mais, comme je l’ai déjà dit, son choix à cet égard dépend beaucoup de l’état de la saison et du degré de température.

Sa nourriture consiste principalement en gros vers de terre, dont elle peut avaler en une seule nuit presque aussi pesant qu’elle. Ses facultés digestives égalent celles des hérons, et il n’est pas rare de lui trouver des vers entiers dans l’estomac. Elle les prend en enfonçant son bec dans la terre humide ou dans la vase, et en retournant les feuilles sèches au milieu des bois. En captivité, elle s’habitue promptement aux morceaux de fromage, aux grains de blé et au vermicelle ramollis dans l’eau. J’en ai vu devenir assez familières pour se laisser caresser de la main de leur maître. Je m’avisai un jour d’en observer quelques-unes, pendant qu’elles fouillaient de la vase contenue dans un tube où l’on avait introduit des vers ; cela se passait dans une chambre à demi obscure. Elles enfonçaient leur bec jusqu’aux narines, mais jamais plus avant ; et d’après les mouvements que je remarquais à la base des mandibules, je conclus que ces oiseaux avaient le pouvoir de produire à l’extrémité une sorte de vide, qui leur permettait de saisir les vers par un bout et de les attirer par succion dans le gosier, sans avoir besoin de retirer leur bec, comme le font les courlis et les barges. Un fait dont je fus également témoin me donna une idée de la subtilité de leur vue, tandis qu’elles sont ainsi occupées : dans