Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/425

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jette en l’air, le reçoit adroitement dans son bec et l’avale, pour recommencer aussitôt à en chercher d’autres. Je doute fort qu’il saisisse jamais une proie qu’il ne puisse engloutir tout entière d’un seul coup. Ces oiseaux ont la singulière habitude de plonger sous tout corps que le vent ou les courants ballottent à la surface de l’eau, comme des tas d’herbes et de feuilles, ou bien des substances verdies et décomposées par la putréfaction ; et cette habitude, ils ne la perdent pas, même en état de domesticité parfaite. Mon ami John Bachman en avait un qui plongeait ainsi dès qu’il approchait, à quelques pieds, d’une masse de balles de riz qui flottait sur un de ces étangs où monte la marée, dans le voisinage de Charleston. De même que l’oie commune, l’Anhinga baisse toujours la tête quand il passe sous l’arche d’un pont peu élevé, sous une branche ou le tronc d’un arbre qui s’avance au-dessus du courant. En nageant sous l’eau, il ouvre en partie les ailes, sans les employer cependant comme moyen d’impulsion ; mais la queue est entièrement étendue, et il se sert de ses pieds en guise de rames qu’il fait aller ensemble ou alternativement.

La quantité de poisson qu’il absorbe, pour sa consommation journalière est réellement surprenante : un matin, mon ami Bachman et moi, nous commençâmes par donner à l’un de ces oiseaux, qui n’avait pas plus de sept mois, un poisson noir[1] de neuf pouces et demi de long sur deux de large. La tête était bien plus

  1. La Perche noire.