Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/466

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tout était dans une confusion inexprimable ; et nous mêmes, en reportant nos regards vers ces masses profondes qui s’effaçaient peu à peu dans le lointain, nous ne pouvions nous empêcher de reconnaître que la vue seule d’un tel spectacle valait qu’on traversât l’Océan. Pour moi, je l’avoue, j’éprouvais un vif regret de n’avoir pu le contempler de près ; du moins, je vous en offre ici la description telle que me l’a donnée notre pilote, M. Godwin.

« Le rocher principal se termine en haut par une plate-forme d’un quart de mille de large, du nord au sud ; mais plus étroite dans l’autre sens. Son élévation peut être de quatre cents pieds. Il est situé par 47° 52’ de latitude. Le ressac en bat la base avec violence, sauf après un long calme ; et il est très difficile d’y aborder, encore plus de l’escalader jusqu’au sommet. Le seul point par où l’on peut en approcher est du côté du sud ; et à l’instant même où le bateau vient à y toucher, il faut le tirer à sec sur le roc. La surface entière de la plate-forme est couverte de nids, placés comme à deux pieds l’un de l’autre, et disposés en ordre si régulier que l’œil peut plonger entre les lignes qui courent nord et sud, aussi facilement qu’il se dirige entre les sillons d’un champ profondément labouré. Les pêcheurs du Labrador et autres qui visitent, chaque année, ce lieu extraordinaire, afin de faire provision de chair de Fou, dont ils se servent comme d’amorce pour la pêche de la morue, y montent par petites troupes de huit ou dix, emportant pour toute arme, chacun un gros bâton ; et sur-le-champ, ils commencent leur œuvre de carnage.