Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/76

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Dès qu’il se sent blessé, le grand Héron bleu se prépare à la défense ; et malheur au chasseur ou au chien qui, sans précaution, approche de son redoutable bec ! il est certain de recevoir une cruelle blessure, et d’autant plus dangereuse, que l’oiseau vise ordinairement aux yeux. Si on le frappe avec une gaule ou un long bâton, il se renverse sur le dos et donne de grands coups de bec et de griffes. J’en ai tué plusieurs qui, longtemps après la mort, restaient pendus à l’arbre par les pieds. J’ai vu aussi ce héron donner la chasse à l’aigle pêcheur, alors que ce dernier s’en allait sans défiance au travers des airs, cherchant une place où il pût manger en paix le poisson qu’il tenait dans ses serres. Bientôt le héron l’avait rejoint, et à peine faisait-il mine d’attaquer, que l’aigle lâchait sa proie, et l’autre, se laissant glisser en bas, allait tranquillement la ramasser par terre. Dans une de ces rencontres, le poisson retomba dans l’eau, et le héron, vexé de ne pouvoir en profiter, s’acharna contre le pauvre aigle, et le poursuivit jusqu’au milieu des bois.

Le vol du grand Héron bleu est égal, puissant, et peut se soutenir longtemps sans faiblir. En s’enlevant de terre ou en quittant la branche, il reste silencieux, et part, le cou tendu et les jambes pendantes ; puis son cou se retire en arrière, les jambes s’allongent en droite ligne à la suite du corps, et il continue sa route par des battements d’ailes faciles et mesurés ; tantôt rasant la surface des marais, tantôt, comme s’il y eût apparence de danger, passant à une grande hauteur au-dessus des champs et des forêts. Il va directement d’un