Page:Augier - Théatre complet, tome 5, 1890.djvu/437

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Tenancier.

Oh ! madame ! pouvez-vous croire ?…

Navarette, avec une amertume mélancolique.

Hélas ! je n’aurais pas le droit de m’en plaindre ! Ne nous interdit-on pas, je ne dis pas même un retour, mais une aspiration au bien ? Et quand vous avez vous-même entendu raconter quelque bonne action d’une de nous, ne vous êtes-vous pas demandé : « Qu’est-ce que ça lui peut donc rapporter ? »

Tenancier.

Mon Dieu, madame, je conviens qu’avant de vous connaître…

Navarette.

Ce que ça nous rapporte ? Rien et tout… un peu de notre propre pardon !… Croyez à ma sincérité ou n’y croyez pas, peu m’importe ! Ce n’est pas votre estime que je cherche, c’est la mienne.

Tenancier.

J’y crois, madame ; j’y crois si bien, que je n’ose plus vous dire le but de ma démarche… sinon pour vous en offrir mes très humbles excuses. Mais l’aveu de l’injure que je vous faisais en sera le châtiment. Je venais brutalement, stupidement, acheter votre silence…

Navarette, se levant vivement.

Est-ce la marquise qui vous envoyait ?

Tenancier.

Ah ! grand Dieu, non ! elle a de vous une opinion… que je partage désormais.