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AVERTISSEMENT


Ce livre n’est pas un ouvrage de science, un traité d’archéologie ou d’architecture. Le point de vue de l’auteur, ses procédés d’observation, ses moyens d’expression sont tout autres que ceux des érudits ; si l’artiste et les érudits se rencontrent dans les mêmes conclusions, ils y sont arrivés par des chemins différents. Mais on reconnaîtra qu’un tel accord confère à ces conclusions une valeur et une signification incomparables.

C’est donc uniquement l’œuvre d’un artiste que nous présentons ici au public, — d’un artiste auquel on ne contestera pas le sens de la beauté. Au jour le jour, au hasard des visites qu’il fait périodiquement aux Cathédrales, Rodin a noté ses observations, motivé ses admirations. Ce sont ces Notes que nous publions, telles quelles, dans le désordre apparent où pourtant elles s’harmonisent et se composent entre elles ; nous en avons respecté scrupuleusement la forme, qui, négligeant les transitions, laisse aux sentiments et aux idées toute leur spontanéité, toute leur force persuasive. De là certaines répétitions, mais qui ont leur intérêt. Rodin, par exemple, revient souvent sur l’inconvenance des restaurations qui défigurent tant de beaux édifices du moyen âge. On comprend que sur un tel sujet il ait jugé utile d’insister.

On sera peut-être surpris que des monuments de premier ordre — Bourges, Paris, etc. — aient été passés sous silence. Mais on se rendra vite compte que l’intention de Rodin n’était de décrire ni toutes ni même les principales églises romanes et gothiques de France. Il s’est proposé d’éveiller les sensibilités et les intelligences par des observations générales, précisées en quelques grandes images. Le lecteur, en vertu de cet enseignement et par analogie, pourra comprendre les œuvres dont il ne lui est point parlé en ce livre. Comme dit Montesquieu : « Quand vous traitez un sujet, il n’est pas nécessaire de l’épuiser ; il suffit de faire penser. »