Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome X.djvu/474

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

immuable ; mais, lorsqu’il s’agit de Dieu en tant qu’il est le Père, on ne veut évidemment que te parler du Fils ; car on ne peut donner à Dieu le nom de Père qu’autant qu’il a un Fils ; comme il est impossible d’imaginer un Fils, s’il n’y a pas de Père. Mais ne va pas honorer le Père, comme s’il était plus grand que le Fils, et celui-ci comme s’il était plus petit que le Père ; ne me dis pas : J’honore le Père, car je sais qu’il a un Fils ; et je ne me trompe pas en lui donnant le nom de Père, parce que je ne le conçois pas comme n’ayant point de Fils ; quant au Fils, je l’honore comme inférieur au Père. Le Fils t’arrête et te rappelle à la vérité par ces paroles : « Afin que tous honorent le Fils », non pas d’une manière moindre, mais « comme ils honorent le Père ». « Celui », donc, « qui n’honore point le Fils, n’honore pas non plus le Père qui l’a envoyé ». – Moi, dis-tu, je veux rendre au Père un honneur plus grand, et au Fils un honneur moindre. – Tu refuses l’honneur au Père, dès que tu en rends un moindre au Fils. À considérer ainsi les choses, ne fais-tu point profession de dire que si le Père n’a pas engendré un Fils égal à lui, c’est qu’il ne l’à pas voulu ou qu’il en a été incapable ? S’il ne l’a pas voulu, ç’a été jalousie de sa part ; s’il en a été incapable, c’est que la puissance lui manquait. Ne vois-tu pas que cette manière de voir est injurieuse au Père, tout en paraissant plus honorable pour lui ? Honore donc le Fils, comme tu honores le Père1 afin de les honorer également l’un et l’autre.
7. « En vérité, en vérité, je vous le dis : Celui qui écoute ma parole et croit en Celui qui m’a envoyé, a la vie éternelle et ne sera point condamné, il passe de la mort à la vie ». Faites attention à ceci : « Celui qui écoute ma parole » ; et le Sauveur n’ajoute pas : Croit en moi, mais : « à Celui qui m’a envoyé ». Qu’on écoute donc la parole du Fils et qu’on croie au Père. Pourquoi écouter votre parole et croire à un autre ? Quand nous Écoutons un homme, ne croyons-nous pas à ce qu’il nous dit ? Ne lui donnons-nous pas toute notre confiance ? Qu’a donc voulu exprimer le Sauveur par ces mots : « Celui qui écoute ma parole et croit à celui qui m’a envoyé ? » Ceci, évidemment : sa parole se trouve en moi. Que signifie ce passage : « Écoute ma parole ? » Il veut dire m’écoute. « Et croit à celui qui m’a envoyé ? » En croyant à lui, il croit à sa parole, et en croyant à sa parole, il me croit, parce que je suis le Verbe du Père. La paix règne dans les Écritures ; tout s’y trouve disposé dans un ordre admirable ; rien n’y peut donner lieu à dispute. Chasse donc de ton esprit toute idée de chicane ; remarque l’accord de nos livres saints. La vérité se mettrait-elle en contradiction avec elle-même ?
8. « Celui qui écoute ma parole et croit à Celui qui m’a envoyé, a la vie éternelle et ne sera pas condamné ; il est passé de la mort à la vie ». Vous vous en souvenez : nous avons trouvé, tout à l’heure, une difficulté dans ces paroles : « Comme le Père ressuscite les morts et les vivifie, ainsi le Fils vivifie ceux qu’il veut ». La lumière commence à se faire ; le Sauveur commence à parler de la résurrection des morts, et nous voyons déjà les morts sortir du tombeau. Car « celui qui écoute ma parole et croit à celui qui m’a envoyé, a la vie éternelle et ne sera pas condamné ». Prouvez que celui-là est ressuscité. Mais, dit le Sauveur, « il est passé de la mort à la vie ». Personne ne saurait en douter : celui qui est passé de la mort à la vie est évidemment ressuscité, Comment, en effet, passer de la mort à la vie, si l’on ne s’est d’abord trouvé dans un état de mort, si l’on n’est premièrement privé de vie ? Mais en passant de la mort à la vie, on se trouve dans l’une, et l’on n’est plus dans l’autre. Celui-là était donc mort, et il est ressuscité ; il était perdu, et il est retrouvé [1]. Une sorte de résurrection s’opère, par conséquent : les hommes passent d’une certaine espèce de mort à un certain état de vie, de la mort de l’incrédulité à la vie de la foi, de la mort de l’erreur à la vie de la vérité, de la mort du péché à la vie de la justice : c’est donc là une sorte de résurrection des morts.
9. Daigne le Sauveur s’ouvrir davantage à nous, et continuer à faire briller plus vivement à nos yeux la vérité de cette résurrection. « En vérité, en vérité, je vous dis que l’heure vient, et elle est déjà venue ». Nous nous attendions à entendre parler de la résurrection des morts qui doit se faire à la fin du monde, à laquelle nous croyons depuis que nous sommes chrétiens, qui fait l’objet de nos espérances, et dont il nous est impossible

  1. Lc. 15, 32