Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome X.djvu/518

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

honorent le Fils comme ils honorent le Père ». Ces dernières paroles : « Afin qu’ils honorent le Fils », se rapportent à la résurrection des âmes. Et comment doivent-ils honorer le Fils ? « Comme ils honorent le Père ». En effet, le Fils opère la résurrection des âmes comme le Père ; il les vivifie de la même manière que lui. Il est donc juste que, pour cette résurrection des âmes, « tous honorent le Fils comme ils honorent le Père ». Mais est-il question d’honneurs à lui rendre à l’occasion de la résurrection des corps ? En quel sens ? Le voici : « Celui qui n’honore pas le Fils, n’honore pas le Père, qui l’a envoyé ». Il ne s’agit pas d’honneurs semblables, mais « d’honneurs » et « d’honneurs ». Car si le Christ-homme est honoré, il ne l’est pas de ta même manière que le Père-Dieu. Pourquoi ? Parce que, sous ce rapport, il l’a dit lui-même : « Mon Père est plus grand que moi [1] ». Quand le Fils est-il honoré comme le Père ? Quand on peut lui appliquer ces paroles : « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et toutes choses ont été faites par lui [2] ». Aussi voici ce qu’il dit de la seconde sorte d’honneurs, qui lui est due : « Celui qui n’honore pas le Fils, n’honore pas le Père qui l’a envoyé ». Et le Fils n’a été envoyé, que parce qu’il s’est fait homme.
14. « En vérité, en vérité, je vous le dis ». Il revient encore une fois à la résurrection des âmes, afin de nous aider, par son insistance, à le bien comprendre : parce que nous n’aurions pu suivre un raisonnement rapide, en quelque sorte, comme le vol de l’oiseau, la parole de Dieu s’arrête avec nous et semble habiter avec notre faiblesse. Il rappelle à nouveau notre attention sur cette résurrection des âmes. « En vérité, en vérité, je vous le dis : celui qui écoute ma parole et croit à Celui qui m’a envoyé, a la vie éternelle », mais comme s’il la recevait du Père. « Celui qui écoute ma parole et croit à Celui qui m’a envoyé, a », de la part du Père, « la vie éternelle », parce qu’il croit en Celui qui a envoyé le Fils ; « et il ne sera point condamné, mais il est passé de la mort à la vie » ; mais il est vivifié par le Père, à qui il a cru. Eh quoi ! ô Fils de Dieu, ne le vivifiez-vous pas aussi ? Remarque bien que « le Fils vivifie aussi ceux qu’il veut. En vérité, en vérité, je vous le dis : l’heure vient, et elle est déjà venue, où les morts entendront la voix du Fils de Dieu, et ceux qui l’entendront, vivront ». Il n’a pas dit en ce passage : Ils croiront à Celui qui m’a envoyé, et, par cela même, ils vivront ; mais il a dit : Ils entendront la voix du Fils de Dieu, et ceux qui « l’auront entendue », c’est-à-dire, ceux qui auront obéi au Fils de Dieu, « vivront ». Ils recevront donc la vie du Père, lorsqu’ils croiront au Père, et ils la recevront du Fils, lorsqu’ils auront entendu la voix du Fils de Dieu. Et pourquoi recevront-ils la vie du Père et du Fils ? Parce que, « comme le Père a la vie en soi, ainsi a-t-il donné au Fils d’avoir en soi la vie ».
15. C’en est fini avec la résurrection des âmes ; reste à parler plus positivement de la résurrection des corps. « Et il lui a donné la puissance de rendre les jugements ». Non-seulement de ressusciter les âmes par la foi et la sagesse, mais encore de rendre les jugements. Pourquoi cela ? « Parce qu’il est le Fils de l’homme ». Il y a donc des choses que le Père fait par son Fils, sans les faire au moyen de sa substance, en laquelle ce Fils lui est égal : ainsi, naître, subir le supplice de la croix, mourir, ressusciter comme son Fils ; car rien de tout cela ne s’est vu dans le Père. De même en est-il de la résurrection des corps. Pour celle des âmes, le Père la fait de sa substance par la substance de son Fils, substance en laquelle celui-ci lui est égal ; car lus âmes entrent en participation de cette immuable lumière, tandis que les corps n’y participent pas. Mais la résurrection des corps est l’œuvre du Père par le Fils de l’homme. « Et il lui a donné la puissance de rendre les jugements, parce qu’il est le Fils de l’homme » : ce passage est d’accord avec cet autre qui le précède : « Car le Père ne juge personne » ; et afin de montrer qu’il a voulu parler de la résurrection des corps, il ajoute : « Ne vous en étonnez pas, l’heure vient ». Il ne dit pas : « l’heure est venue », mais : « l’heure vient, où ceux qui sont dans les sépulcres (hier, nous avons plus que suffisamment traité ce sujet devant vous[3]) entendront sa voix et en sortiront ». Pour quoi faire ? Pour être jugés : « Et ceux qui auront bien fait, en sortiront pour la résurrection de la vie ; mais ceux qui auront mal fait, pour la résurrection du jugement ». Et ce jugement, Seigneur Jésus, vous le ferez seul ; car le Père a donné tout le jugement au Fils, et il ne juge lui-même personne. – C’est moi qui le ferai, dit-il. – Mais comment le ferez-vous ? – « Je ne puis rien faire de moi-même : je juge ainsi que j’entends, et mon n jugement est juste ». Quand il s’agissait de la

  1. Jn. 14, 28
  2. Id. 1, 1, 3
  3. Trait. 22, n. 13