Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome X.djvu/528

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autre chose que placer un signe qui ne puisse être pris pour un autre : sceller de son sceau, c’est donc imprimer un signe sur un objet. Tu apposes une marque sur un objet quelconque donc, tu fais sur lui une empreinte afin de pouvoir le reconnaître et ne pas le confondre avec d’autres. « Le Père l’a » donc « marqué de son sceau ». Il lui a donc imprimé un signe distinctif qui empêche de le comparer aux autres hommes. Aussi, en parlant de lui, le Prophète a-t-il dit : « Dieu, votre Dieu, vous a sacré d’une onction de joie qui vous élève au-dessus de tous ceux qui doivent la partager [1] ». Qu’est-ce donc que marquer de son sceau ? C’est mettre dans un rang à part : c’est, en d’autres termes, établir une préférence entre une personne et ses copartageants. Veuillez donc, nous dit-il, ne pas me mépriser parce que je suis fils de l’homme : demandez-moi, « non le pain qui périt, mais celui qui demeure pour la vie éternelle ». Car je suis de telle manière le fils de l’homme, que vous ne devez point me considérer comme l’un d’entre vous, et que Dieu le Père m’a marqué de son sceau. Il m’a marqué de sou sceau, qu’est-ce à dire ? Il a imprimé sur moi un signe particulier, en vertu duquel je dois délivrer tous les hommes au lieu de me confondre avec eux.
12. « Tous lui dirent donc : Que ferons-nous pour accomplir les œuvres de Dieu ? » Car il leur avait dit lui-même : « Travaillez, non pour la nourriture qui périt, mais pour celle qui demeure dans la vie éternelle ».— « Que ferons-nous ? » Par quelles œuvres pourrons-nous accomplir ce commandement ? « Jésus répondit : L’œuvre de Dieu, c’est de croire en Celui qu’il a envoyé ». Voilà donc ce qui s’appelle manger, « non le pain qui périt, mais celui qui demeure pour la vie éternelle ». Pourquoi tenir prêts tes dents et ton estomac ? Crois, et tu auras pris cette nourriture. En effet, la foi se distingue des œuvres, selon ces paroles de l’Apôtre : « L’homme est justifié par la foi, sans les œuvres de la loi[2] ». Et il y a des œuvres qui paraissent bonnes, sans la foi en Jésus-Christ ; mais, en réalité, elles ne le sont point, arec qu’elles ne se rapportent pas à cette fin, qui donne du mérite à nos œuvres. « Car Jésus-Christ est la fin de la loi, pour justifier ceux qui croiront [3] ». 2 n’a donc pas voulu séparer la foi des œuvres, mais il a déclaré que la foi est une œuvre ; car c’est la foi qui agit par la charité [4]. Et il n’a pas dit : Votre œuvre, mais « l’œuvre de Dieu, c’est de croire en Celui qu’il a envoyé » ; il s’est exprimé ainsi, afin que celui qui se glorifie, se glorifie dans le Seigneur [5]. Mais parce qu’il les excitait à croire en lui, ceux-ci lui demandaient aussi des prodiges qui les porteraient à croire. Vois si vraiment les Juifs ne réclament pas des miracles. Ils lui dirent donc : « Quel signe faites-vous, afin que nous le voyions et que nous croyions en vous ? Quelles sont vos œuvres ? » Pour eux, était-ce peu de chose d’avoir été nourris avec cinq pains ? Non, ils le savaient bien ; mais à cette nourriture, ils préféraient encore la manne du ciel. Pour le Seigneur Jésus, il parlait de lui-même de telle façon qu’il se plaçait au-dessus de Moïse ; car celui-ci n’a jamais osé dire de soi qu’il donnait, non un pain périssable, « mais un pain qui demeure pour la vie éternelle ». Jésus promettait donc plus que Moïse. Les promesses de celui-ci avaient, en effet, pour objet un royaume, une terre où coulaient le lait et le miel, une paix temporelle, un grand nombre d’enfants, la santé du corps, et tous les autres avantages de cette vie. De pareils biens étaient, sans doute, matériels, mais, en définitive, ils étaient la figure des biens spirituels. Ces promesses s’adressaient au vieil homme et sous l’empire de l’ancienne alliance. Les hommes qui suivaient le Sauveur, établissaient donc un parallèle entre les promesses de Moïse et celtes du Christ. De la part du premier, ils avaient en perspective toutes les satisfactions terrestres ; mais c’était un aliment périssable : de la part du Sauveur, ils devaient recevoir, « non la nourriture qui périt, mais celle qui demeure pour la vie éternelle ». Ils remarquaient que ses promesses étaient plus grandes, mais aussi qu’il opérait de moindres prodiges. Ils se rappelaient ceux de Moïse, et ils étaient disposés à en demander de plus frappants encore à celui qui leur faisait de si belles promesses. Que faites-vous, lui dirent-ils, tour que nous croyions en vous ? Veux-tu être certain qu’ils comparaient les miracles de Moïse à celui de la multiplication des pains, et qu’ils regardaient comme les moindres

  1. Ps. 44, 8
  2. Rom. 3, 28
  3. Rom. 10, 4,
  4. Gal. 5, 6
  5. 1 Cor. 1, 31