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TRENTE-TROISIÈME TRAITÉ.

DEPUIS CES PAROLES DE L’Évangile : « PLUSIEURS DONC DE CETTE MULTITUDE AYANT ENTENDU CES MOTS », JUSQU’À CES AUTRES : « ET MOI, JE NE VOUS CONDAMNERAI PAS NON PLUS ALLEZ ET NE PÉCHEZ PLUS DÉSORMAIS ». (Chap. 7, 40-53 ; 8, 1-11.)

LA FEMME ADULTÈRE.

Au lieu de croire en Jésus comme les émissaires qu’ils avaient envoyés pour s’emparer de lui, ou comme Nicodème, ses ennemis cherchaient toutes les occasions de le mettre en contradiction avec lui-même et avec la loi, afin de le faire condamner par le peuple. Ils lui amenèrent donc une femme surprise en adultère, voulant lui reprocher, s’il la condamnait, sa dureté ; s’il la renvoyait absoute, son impiété : sans blesser les règles de la douceur, ni le respect dû à la loi, il leur rappela les imprescriptibles exigences de la justice, qui refuse à des coupables le droit de punir d’autres coupables. Ne comptons point exclusivement sur ta bonté ou sur la sévérité de Dieu, et en nous tenant éloignés de la présomption et du désespoir, nous resterons dans la vérité.


1. Votre charité s’en souvient : dans le discours précédent, et à l’occasion de la lecture qu’on avait faite dans l’Évangile, nous vous avons parlé du Saint-Esprit. Le Sauveur avait invité ceux qui croyaient en lui à s’abreuver à cette source d’eau vive ; au moment où il parlait ainsi, il se trouvait au milieu d’ennemis qui pensaient à se saisir de lui et désiraient le faire mourir, mais n’y parvenaient point, parce qu’il ne le voulait pas. Lorsqu’il leur eut adressé ces paroles, il se produisit dans la foule un dissentiment prononcé entre les uns et les autres : ceux-ci soutenaient qu’il était le Christ, ceux-là disaient que le Christ ne sortirait pas de la Galilée. Pour ceux que les Pharisiens avaient envoyés afin de mettre la main sur lui, ils se retirèrent sans avoir commis le crime qu’on leur avait commandé, mais dans le sentiment de la plus vive admiration. Ils rendirent, en effet, témoignage de la divinité de sa doctrine, car à cette question de ceux qui les avaient envoyés : « Pourquoi ne l’avez-vous pas amené ? » ils répondirent que jamais homme n’avait ainsi parlé devant eux. « Jamais personne n’a parlé comme lui ». Pour lui, il avait ainsi parlé, parce qu’il était Dieu et homme. Cependant, les Pharisiens ne voulurent point recevoir leur témoignage ; aussi leur dirent-ils : « Auriez-vous été séduits – vous-mêmes ? » Il est facile de voir que ses discours vous ont charmés. « Aucun des princes des prêtres et des Pharisiens a-t-il cru en lui ? Mais cette foule qui ne connaît pas la loi est maudite ». Les hommes qui ne connaissaient pas la loi croyaient en Celui qui l’avait donnée ; et ceux qui l’enseignaient en méprisaient l’Auteur. Par là s’accomplissait ce qu’avait dit le Sauveur lui-même : « Je suis venu, afin que ceux qui ne voient pas, voient, et que ceux qui voient, deviennent aveugles [1] ». Les Pharisiens étaient instruits, et ils se sont aveuglés, tandis que les rayons de la vérité ont éclairé les peuples auxquels la loi n’était pas connue, mais qui croyaient en Celui de qui émanait la loi.
2. Toutefois, « parmi les Pharisiens se trouvait Nicodème, qui était venu vers Jésus durant la nuit » ; ce n’était pas un incrédule, mais un homme timide, car, en s’approchant de la lumière durant la nuit, il avait voulu s’éclairer, et, sans néanmoins se faire con naître, il répondit aux Juifs : « Notre loi juge-t-elle un homme avant de l’avoir entendu et d’avoir connu ce qu’il a fait ? » ils étaient effectivement assez mal disposés pour vouloir le condamner avant de le connaître. Quant à Nicodème, il savait, ou plutôt il s’imaginait que si seulement ils voulaient l’écouler avec patience, ils feraient, sans doute, ce qu’avaient fait leurs émissaires qui, au lieu de s’emparer de sa personne, avaient préféré croire en lui. « Ils lui répondirent », en préjugeant les dispositions de son cœur d’après les leurs : « Serais-tu aussi Galiléen ? » c’est-à-dire en quelque sorte infatué par le Galiléen. Le Sauveur portait le nom de Galiléen,

  1. Jn. 9, 39