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L’OISEAU BLEU.

en l’air me sont favorables. Je crois, dit la reine outrée de colère, que les démons s’intéressent pour vous ; mais, malgré eux, votre père saura se faire justice. — Plût au ciel, s’écria Florine, n’avoir à craindre que la fureur de mon père ! mais la vôtre, madame, est plus terrible.

La reine la quitta, troublée de tout ce qu’elle venait de voir et d’entendre ; elle tint conseil sur ce qu’elle devait faire contre la princesse. On lui dit que si quelque fée ou quelque enchanteur la prenaient sous leur protection, ce serait les irriter que de lui faire de nouvelles peines, et qu’il serait mieux d’essayer de découvrir son intrigue. La reine approuva cette pensée ; elle envoya coucher dans sa chambre une jeune fille qui contrefaisait l’innocente : elle eut ordre de lui dire qu’on la mettait auprès d’elle pour la servir. Mais quelle apparence de donner dans un panneau si grossier ? La princesse la regarda comme une espionne : l’on n’en peut ressentir une douleur plus violente. Quoi ! je ne parlerai plus à cet Oiseau qui m’est si cher ? disait-elle. Il m’aidait à supporter mes malheurs, je soulageais les siens, notre tendresse nous suffisait. Que va-t-il faire ? Que ferai-je moi-même ? En pensant à toutes ces choses, elle versait des ruisseaux de larmes.

Elle n’osait plus se mettre à la petite fenêtre, quoiqu’elle l’entendît voltiger autour. Elle mourait d’envie de lui ouvrir ; mais elle craignait d’exposer la vie de ce cher oiseau.

Elle passa un mois entier sans paraître ; l’Oiseau Bleu se désespérait. Quelles plaintes ne faisait-il pas ? Il n’avait jamais mieux ressenti les maux de l’absence et ceux de sa