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L’OISEAU BLEU.

sent aux foires Saint-Germain et Saint-Laurent ; elles faisaient des choses surprenantes, particulièrement deux petites Égyptiennes, qui, pour danser la sarabande et les passe-pieds, ne le cédaient à aucun danseur.

La reine demeura ravie de ce nouveau chef-d’œuvre de l’art nécromancien ; elle ne dit mot jusqu’au soir, qui était l’heure que Truitonne allait à la promenade ; elle se mit dans une allée, faisant galoper ces souris, qui traînaient le carrosse, les ratons et les marionnettes. Cette nouveauté étonna si fort Truitonne, qu’elle s’écria deux ou trois fois : Mie-Souillon, Mie-Souillon, veux-tu cinq sous du carrosse et de son attelage souriquois ? — Demandez aux gens de lettres et aux docteurs de ce royaume, dit Florine, ce qu’une telle merveille peut valoir, et je m’en rapporterai à l’estimation du plus savant. Truitonne, qui était absolue en tout, lui répliqua : Sans m’importuner plus longtemps de ta crasseuse présence, dis-m’en le prix. — Dormir encore dans le cabinet des échos, dit-elle, est tout ce que je demande. — Va, pauvre bête, répliqua Truitonne, tu n’en seras pas refusée. Et se tournant vers ses dames : Voilà une sotte créature, dit-elle, de retirer si peu d’avantage de ses raretés.

La nuit vint, Florine dit tout ce qu’elle put imaginer de plus tendre, et elle le dit aussi inutilement qu’elle avait déjà fait, parce que le roi ne manquait jamais de prendre son opium. Elle attendait très impatiemment le jour, pour voir quel effet ses discours auraient produit. Mais hélas ! il n’en fut ni plus ni moins que la première fois. Il n’y avait plus qu’un œuf dans son sac dont elle dût espérer