Page:Aulnoy - Les contes choisis, 1847.djvu/29

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
11
LA BELLE AUX CHEVEUX D’OR.

vous battrez, j’irai lui mordre les jambes ; il baissera la tête pour me chasser, et vous le tuerez. Avenant admirait l’esprit du petit chien ; mais il savait assez que son secours ne suffirait pas.

Enfin il arriva proche du château de Galifron ; tous les chemins étaient couverts d’os et de carcasses d’hommes qu’il avait mangés ou mis en pièces. Il ne l’attendit pas longtemps, qu’il le vit venir à travers d’un bois ; sa tête passait les plus grands arbres, et il chantait d’une voix épouvantable :

Où sont les petits enfants,
Que je les croque à belles dents ?
Il m’en faut tant, tant et tant,
Que le monde n’est suffisant.

Aussitôt Avenant se mit à chanter sur le même air :

Approche, voici Avenant,
Qui t’arrachera les dents,
Bien qu’il ne soit pas des plus grands,
Pour te battre il est suffisant.

Quand Galifron entendit ces paroles, il regarda de tous côtés, et il aperçut Avenant l’épée à la main, qui lui dit deux ou trois injures pour l’irriter. Il n’en fallait pas tant, il se mit dans une colère effroyable ; et prenant une massue toute de fer, il aurait assommé du premier coup le gentil Avenant, sans un corbeau qui vint se mettre sur le haut de sa tête, et avec son bec lui donna si juste dans les yeux, qu’il les creva ; son sang coulait sur son visage, il était comme un désespéré, frappant de tous côtés. Avenant l’évitait, et lui portait de grands coups d’épée qu’il