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FEUILLETON DU JOURNAL DES DÉBATS

du 9 août 1910 [51]




EMMA


Par Jane Austen


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Traduction de M. PIERRE DE PULIGA


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Quelques-uns des assistants se mirent à rire et acceptèrent la question avec bonne humeur. Mme Elton, d’autre part, étouffait d’indignation en entendant faire allusion à la présidence de Mlle Woodhouse. La réponse de M. Knightley fut brève :

— Mademoiselle Woodhouse, dit-il, souhaite-t-elle véritablement de connaître toute notre pensée ?

— Oh ! non, reprit Emma, d’un air détaché, je ne désire pas m’exposer à cette épreuve.

— C’est un genre d’interrogation, dit Mme Elton avec emphase, que je ne me serais pas arrogé le privilège de poser. Bien que comme chaperon… Je n’ai jamais, ajouta-t-elle à mi-voix en se penchant vers son mari, dans aucune société, aucune excursion… Jeune fille… femme mariée…

— C’est parfaitement vrai, ma chère, répondit M. Elton ; néanmoins, il vaut mieux prendre la chose en riant. Tout le monde a conscience des égards qui vous sont dûs.

— Je n’ai pas de succès, murmura Frank Churchill à Emma, ils sont pour la plupart offensés. Je vais m’y prendre mieux : Mesdames et Messieurs, par ordre de Mlle Woodhouse, je suis chargé de dire qu’elle renonce à connaître vos pensées ! Nous sommes sept ici, sans nous compter (Mlle Woodhouse a la bonté d’estimer que j’ai déjà donné la mesure de mon esprit) et elle vous prie de bien vouloir émettre, chacun


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