Page:Austen - La Famille Elliot T1.djvu/155

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ral Croft et de sa Sophie, pouvait seul donner à Alice une idée du sentiment qui l’unissait naguère à Frederich ; même confiance, mêmes goûts, mêmes opinions, même attachement l’un pour l’autre, et se voir, se traiter comme des étrangers, et moins bien que des étrangers, car ils ne pouvaient se rapprocher, et voir s’établir entre eux les douces liaisons de l’amitié ! c’était un perpétuel contraste entre le passé et le présent, qui rendait pour Alice le présent bien douloureux.

Quand il parlait, elle entendait le même son de voix, elle retrouvait le même esprit si gai, si animé, si aimable. On était à Uppercross dans une ignorance totale en matière de marine et de navigation : il était sans cesse questionné, d’abord par la bonne mère, qui saisissait ce prétexte pour parler de son pauvre Richard, auquel elle n’avait jamais tant pensé ; puis par les deux jeunes filles, qui n’avaient d’yeux que pour le charmant capitaine, et qui, pour lui faire plaisir et attirer son attention, ne cessaient de lui demander des détails de la manière de vivre à bord d’un vaisseau, et témoignaient leur surprise en apprenant qu’on y vivait à-peu-près comme sur terre. Ces conversations donnaient lieu à mille