Page:Austen - La Famille Elliot T1.djvu/157

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il y a long-temps qu’il est mis en pièces ; je suis le dernier qui l’aie monté ; à peine pouvait-il faire encore le service pour un an ou deux ; on lui fit faire ses adieux à la mer par un voyage aux Indes occidentales, où j’eus l’honneur de conduire sa vieille carcasse à demi-pourrie.

— Qu’est-ce que vous dites là contre l’Aspic ? dit l’amiral : jeune homme, ce fut la meilleure et la plus belle frégate ; elle n’avait pas son égale, et quand, vous en avez obtenu le commandement, toute vieille qu’elle était, vingt officiers y prétendaient, et vous fûtes bien heureux d’être aussi jeune sur cette vieille carcasse !

— Je sentis tout mon bonheur, amiral, je vous assure ; dit le capitaine sérieusement ; j’étais aussi content qu’il est possible de l’être ; c’était une grande affaire pour moi dans ce temps-là ! je brûlais d’être employé, et de retourner sur mer.

— Je le comprends : qu’est-ce que fait un jeune homme sur terre ? rien de bon, à moins qu’il n’ait une femme, et il fallait avoir de l’argent avant de songer à se marier ; à présent que vous avez l’un, vous allez, j’espère, penser à l’autre : un homme sans femme, est, ma foi, comme un vaisseau sans gouvernail. »