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LA VIE RURALE.


Ils étaient vénérés de tous les alentours,
Ils en étaient chéris. Que de jeunes amours
S’étaient abrités sous leur ombre !
Que d’oiseaux sous la feuille on entendait jaser !
En juin, qu’il était bon d’aller s’y reposer,
Comme en un temple frais et sombre !

Troncs sacrés, rameaux saints ! Tout homme à leur aspect
S’inclinait ; vous seul, vous, étranger au respect,
Vous avez dit : « Qu’on m’en délivre !
Avec l’or qu’ils feront, j’aurai pour mes travaux
Un amoncellement de volumes nouveaux ;
Un arbre ne vaut pas un livre. »

Érostrate caduc, mêlé de Trissotin,
Vous avez dit cela, je ne sais quel matin
Que vous sortiez d’un mauvais rêve.
Aussitôt, sous les bras de trente bûcherons,
Les rameaux sont tombés, les rameaux et leurs troncs,
Hélas ! tout débordants de séve.

Les nymphes, qui dansaient et qui chantaient en chœur,
Ont pleuré. Les sylvains meurtris, frappés au cœur,
Ont maudit vos ordres stupides.