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LA VIE RURALE.

L’unanime concert des mains et des bravos,
Rarement du triomphe on brise l’habitude
Pour chercher le silence et l’humble solitude !
Un César détrompé qui de l’empire sort
Et va mettre, à Saint-Just, les horloges d’accord,
Ou bêcher, à Salone, un carré de légumes,
Prouve un détachement en dehors des coutumes.
Ce rude effort demande une âpre volonté.
C’est ce que tu sauras quand tu l’auras tenté.
D’ailleurs, te parlerai-je un langage sincère ?
Bien plus que tu ne crois, Paris t’est nécessaire :
Ce foyer de rayons, ce lieu fascinateur,
Ce splendide Paris est un grand corrupteur ;
On y respire un air plein de subtile flamme,
Qui, très-bon pour l’esprit, est fort mauvais pour l’âme ;
Des pouvoirs de ce monde aucun ne vaut le sien
Pour amollir un cœur même stoïcien.
Si Caton le visite, il perd de sa sagesse ;
Et, quand je dis Caton, je dis aussi Lucrèce !
Quiconque dans ses murs s’est longtemps attardé,
S’y croyant possesseur, lui-même est possédé.
Il ne comprendra plus, tant son Paris l’enivre,
Que, loin du boulevard, un homme puisse vivre ;
Que, privé du Gymnase, on respire le soir,