Page:Autran - Œuvres complètes, t5, 1877.djvu/163

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Il écoute, pensif, et, comme dans un rêve,
Il entend des marins qui parlent sur la grève.
Leurs apprêts sont finis, et, dès le jour suivant,
Si les cieux invoqués leur accordent le vent,
Ils partent pour la rive où l’amour les renvoie.
Le vieillard tressaillit d’une secrète joie :
Il avait reconnu l’accent ionien,
Accent d’un cher pays, puisque c’était le sien !

« O vous, nés après moi d’une mère commune,
Laissez-vous émouvoir à ma longue infortune,
Et, demain, sur ces bords ne m’abandonnez pas !
Les chemins étrangers ont épuisé mes pas.
Vous voyez ma misère, amis ; daignez me rendre
Au rivage natal qui doit garder ma cendre… »
C’est ainsi qu’il mêlait sa plainte au bruit des flots.

« Qui donc es-tu, vieillard ? dit un des matelots ;
As-tu, pour qu’un patron t’accorde le passage.
Une somme à donner, ou seulement un gage ? »

» Hélas, non ! quel tribut pourrais-je vous payer ?
Je ne suis qu’un chanteur contraint à mendier. »