Page:Béranger, oeuvres complètes - tome 1.pdf/20

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être pousser la reconnaissance trop loin que de faire ainsi leur besogne. Je le répète : le courage m’a manqué. On n’incendie guère sa maison que lorsqu’elle est assurée. Ce que je puis dire d’avance à ceux qui se font les exécuteurs des hautes œuvres littéraires, c’est que je suis complètement innocent des éloges exagérés qui m’ont été prodigués ; que jamais il ne m’est arrivé de solliciter le moindre article de bienveillance ; que j’ai été même jusqu’à prier des amis journalistes d’être pour moi plus sobres de louanges ; que, loin de vouloir ajouter le bruit au bruit, j’ai évité les ovations qui l’augmentent ; me suis tenu loin des coteries qui le propagent ; et que j’ai fermé ma porte aux commis-voyageurs de la Renommée, ces gens qui se chargent de colporter votre réputation en province et jusque dans l’étranger, dont les revues et les magasins leur sont ouverts.

Je n’ai jamais poussé mes prétentions plus haut que ne l’indique le titre de chansonnier, sentant bien qu’en mettant toute ma gloire à conserver ce titre auquel je dois tant, je lui devrais encore d’être jugé avec plus d’indulgence, placé par là loin et au-dessous de toutes les grandes illustrations de mon siècle. Le besoin de cette position spéciale a toujours dû m’ôter l’idée de courir après les dignités littéraires les plus enviées et les plus dignes de l’être, quelque instance que m’aient faite des amis influents et dévoués, qui, dans la poursuite de ces dignités,