Page:Béranger, oeuvres complètes - tome 1.pdf/22

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ont exercée. Il est des instants, pour une nation, où la meilleure musique est celle du tambour qui bat la charge.

Après tout, si l’on trouve que j’exagère beaucoup l’importance de mes couplets, qu’on pardonne au vétéran qui prend sa retraite, de grossir tant soit peu ses états de services. On pourra même observer que je parle à peine de mes blessures. D’ailleurs, la récompense que je sollicite ne fera pas ajouter un centime au budget.

Comme chansonnier, il me faut répondre à une critique que j’ai vu plusieurs fois reproduite. On m’a reproché d’avoir dénaturé la chanson, en lui faisant prendre un ton plus élevé que celui des Collé, des Panard, des Désaugiers. J’aurais mauvaise grâce à le contester, car c’est, selon moi, la cause de mes succès. D’abord, je ferai remarquer que la chanson, comme plusieurs autres genres, est toute une langue, et que, comme telle, elle est susceptible de prendre les tons les plus opposés. J’ajoute que depuis 1789, le peuple ayant mis la main aux affaires du pays, ses sentiments et ses idées patriotiques ont acquis un très-grand développement ; notre histoire le prouve. La chanson, qu’on avait définie l’expression des sentiments populaires, devait dès lors s’élever à la hauteur des impressions de joie ou de tristesse que les triomphes ou les désastres produisaient sur la classe la plus nombreuse. Le vin