Page:Bérard - La résurrection d’Homère, 1930, 1.djvu/86

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bouches du Nil ; Proteus, nous dit l’Odyssée. Car Ménélas, au chant IV, raconte comment il fut retenu trois semaines par les vents contraires sur l’île déserte de Pharaon, Pharos, non loin des bouches de l’Égyptos, et comment il fut secouru par la nymphe Idothée, fille de l’un des dieux de la mer, de l’immortel Protée, le prophète d’Égypte : « Ah ! lui, si tu pouvais le prendre en embuscade ! avait dit Idothée à Ménélas ; il te dirait la route, la longueur des trajets et comment revenir sur la mer aux poissons ; si tu le désirais, ô nourrisson de Zeus, il te dirait encore tout ce qu’en ton manoir, il a pu survenir de maux et de bonheurs. — Quelle embûche dresser à ce vieillard divin ? avait répondu Ménélas. Il fuira s’il me voit de loin ou me devine : mettre un dieu sous le joug, c’est assez malaisé pour un simple mortel ! ».

Idothée. — Quand le soleil, tournant là-haut, touche au zénith, on voit sortir du flot ce prophète des mers : au souffle du Zéphyr, qui rabat les frisons de sa noire perruque, il monte et va s’étendre au creux de ses cavernes ; en troupe, autour de lui, viennent dormir les phoques de la Belle des Mers, qui sortent de l’écume, pataugeant, exhalant l’âcre odeur des grands fonds. Je t’emmène là-bas dès la pointe de l’aube ; je vous poste et vous range ; à toi de bien choisir sur les bancs des vaisseaux trois compagnons d’élite… Mais je dois t’enseigner tous les tours du Vieillard. En