Page:Bérard - La résurrection d’Homère, 1930, 2.djvu/181

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effraient le jeune homme ; il souhaiterait quelque puissant allié :

Télémaque. — Mais voyons ! réfléchis ! n’as-tu pas d’allié qui, d’un cœur dévoué, pourrait nous secourir ?

Le héros d’endurance, Ulysse le divin, lui fit cette réponse :

Ulysse. — Je vais t’en nommer deux : écoute et me comprends ! Si nous avions, avec Zeus le père, Athéna, crois-tu qu’ils suffiraient ? ou faudrait-il chercher un autre défenseur ?

Posément, Télémaque le regarda et dit :

Télémaque. — Pour de bons alliés, ceux que tu dis le sont, bien qu’ils trônent un peu trop haut dans les nuées !… Des mortels et des dieux, il est vrai qu’ils disposent.

Nous avons là, je crois, le vrai ton de la plaisanterie homérique, — simple, rapide, sans pédantisme appuyé, sans métaphores obscures ou délayées, mais tirée du langage, des dictons et des mœurs populaires.

Six fois dans l’Odyssée, la formule « Quel mot s’est échappé de l’enclos de tes dents ? » se rencontre au début d’un discours d’invectives ou de reproches. Elle signifie assurément : « Comment donc as-tu pu nous lâcher ce mot-là ? » Le ton railleur n’est pas douteux ; mais il est difficile de mesurer la véhémence du reproche et d’en donner l’exacte explication.