Page:Bérard - La résurrection d’Homère, 1930, 2.djvu/89

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Mais en était-il encore ainsi au temps du Poète, dans ces villes d’Asie-Mineure où l’émigration achéo-ionienne était venue fonder ses sociétés nouvelles ?

Bien des changements étaient survenus au long des trois siècles qui séparaient le Poète de ses héros. À la féodalité de sang divin, avait succédé une aristocratie de richesse et d’intelligence, qui, du commerce et du savoir, non plus seulement de la guerre et de la vaillance, faisait les principaux de ses soucis et de ses mérites. Aux manoirs d’Europe, s’étaient substituées des cités populeuses et industrieuses : toujours régies par des dynasties héréditaires, elles se plaisaient à en faire remonter l’origine aux plus authentiques héros de l’épos, aux « Croisés » de la guerre de Troie ; mais déjà leur peuple de citoyens ne voyait plus en ces royautés que des magistratures, dont le pouvoir devait être limité par les désirs et intérêts de la communauté et dont les plaisirs et bénéfices devaient être partagés par la foule.

Le drame épique et sa mise en scène avaient dû s’accommoder aux besoins de ce nouvel état social : le mégaron ne pouvait plus suffire à contenir les milliers de spectateurs qui, les jours de fêtes, accouraient entendre le rhapsode. Il fallut préparer de véritables théâtres, provisoires ou définitifs, dont nous ne con-