Page:Bachelet - Dezobry - Dictionnaire général des lettres, des beaux-arts et des sciences morales et politiques.djvu/85

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ALL 77 p ALL

a’vu se former deux brillantes écoles de sculpture, à Berlin avec Schadow, Rauch et Tieck, à Munich avec El›erliardt, Wagner et Schwanthaler, écoles essentiellement spiritualistes, où l’on tend à sacrifier à la vérité de l’expression la beauté de la forme. B.

Attzxmona (Gravure en). V. Gmlvumz.

’ ALLEMAGNE (Musique en). Aucun fait concernant lfhîstoire de la musique en Allemagne n’est antérieur au xi* siècle. A cette époque, Francon, de Cologne, dans son A ›’s cantús mensurabtlis (V. Gerbert, Scriptores eccleszastici de Illusicâ sacrá, t. II), développa, s’il ne les inventa, les principes de la musique mesurée, et donna des signes à la division du temps musical. Marchetti en Italie et Jean de Muris en France appliquèrent ses préceptes, et établirent les premiers fondements de la science de l’harnionie : mais l’Allemagne, se laissant devancer par la Flandre (V. ce mot), demeura stationnaire pendant plusieurs siècles, et n eut d’autres chants ne ceux de ses Minnesœnger et de ses Meistersœngerflg. ces mots), a la fois poëtes et musiciens. Elle ne connut même pas l’harmonie : tandis que déjà, dans les autres pays, le contrepoint simple était appliqué au plain-chant, le chant ecclésiastique en Allemagne était tout à l’uiñss@n.

Au xv° siècle, le génie musical s’éveilla. Dans un recueil d’hymnes, dont quelques-unes sont écrites par Jean Huss, la musique fut adaptée pour la première fois à des paroles allemandes. Henri Isaac, qui devint maître de chapelle à Florence, mit en musique à 3 voix les poésies de Laurent de Médicis. Étienne Mahu et Jean Godendach figurent aussi parmi les plus anciens maîtres allemands. Toutefois l’Allemagne fut encore plus féconde en théoriciens et en instrumentistes qu’en compositeurs. Parmi les écrivains sur la musique, on remarque Martin Agricola de Magdebourg et Jean Kepler, qui n’ont cependant pas apporté de changements notables dans le système musical. Au nombre des exécutants habiles, nous citerons l’aveugle Conrad Paulmann, qui excellait sur la plupart des instruments’et inventa la tablature du luth, et Bãånliard, organiste de S’-Marc à Venise, inventeur des p ses.

La Réformation religieuse du xv|° siècle, si fatale aux progrès des autres arts, donna, au coutral’e, un grand essor à la musique religieuse. Luther, passionné pour elle comme Pavait été Jean Huss, admit le chant des psaumes parmi les cérémonies du culte protestant ; il composa luiëmeme des chorals pleins d’élévation et d’énergie, qui sont encore enusage aujourd’hui parmi ses sectateurs. Henri de Gœttingue alla jusqu’à mettre en musique le catéchisme de la Confession d’Augsbourg. Sous Finspiration du réformateur, l’enseignement de la musique fut introduit dans toutes les écoles ; les villes eurent des corps de musique ; on plaça des sonneries ou carillons dans les tours et les clochers. Il est vrai de dire que Luther limitait la musique a l’harmonie la plus simple ; car il voulait dans les syllabes et les notes du choral une symétrie, une uniformité de valeurs, qui excluaient toute cadence et toute modulation. Seulement, des interludes d’orgue séparai ont les’strophes, et pouvaient donner quelque variété a l’exécution musicale.-Les États catholiques allemands ne voulurent pas rester en arrière. L’enseignement de la musique y fit aussi partie de l’éducation ; des chapelles furent établies dans les principales villes, et celle de Munich, la plus fameuse de toutes, eut pour maître le Flamand Orlando di Lasso ou Roland de Lettre. Charles-Quint, très-bon musicien, voulut avoir un orchestre régulier, et ce fut quand il établit sa cour à Bruxelles que les concerts de voiav prirent naissance. Une foule de compositeurs égalèrent par le talent les plus grands musiciens des Pays-Bas, de la France et de l’Italie. Tels furent : Senfl, ami de Luther et de Mélanchthon, et qui, avec eux, perfectionna le chant choral ; Jean Knefel, auteur de chants a 5, 6 et 7 voix, avec accompagnement d’instruments, premier exemple de morceaux concertants en Allemagne ; Jacques Gallus ou Haendel, excellent contrapontiste ; et, à un rang secondaire, Jean Meister, Thomas Stolzer, Arnold de Prague, Dietrich, Jean Crespel, Practorius, Aichinger, Walther, Osiander, Amerbach, Eccard, Galliculus, Obrecht, Lewis, Dux, Eckel, Lembin, etc. En même temps, plusieurs théoriciens, Calvisius, Henri Fiuck, André Ornithoparchus, Rhaw, Frosch, Bünting, H. Faber, Lossius, J. Avianus, Schnegass, Burmeister, Reisch, llcnri Lorit dit Glareanus, propageaient les préceptes que Franchino Galïorio venait de formuler en Italie dans sa Théorie de Vharmonie.

Les progrès de la musique, entraves au commencement du xvu° siècle par les malheurs de la guerre de Trente ans, devinrent ensuite aussi brillants que rapides. Jusque-là il n’y avait eu dans toute l’Europe qu’un-style, qu’un système d’harmonie et de tonalité. Avec Adam Gumpelzhaimer, Léon Hasler, et Chrétien Erbach, la mé< lodie et l’harmonie allemandes prirent la physionomie particulière, le cachet original de grandeur, d’élévation, de mélancolie ou de reverie mystique, qu’elles ont conservé désormais. Après eux commence une série de grands musiciens, qui se développe pendant le xvu1e siècle ; leurs œuvres se propagent, grâce à l’imprimerie de la musique, inventée à Leipzig par Breitkopf. La musique d’orgue compte des exécutants et des compositeurs de premier ordre, Samuel Scheid, Gaspard de Keri, Froberger, Reinke de Hambourg, Buxtehude, Jean-Séb. Bach, qui les surpassa tous, Guillaume Friedmann, Kirnberger, Kintel, Albrechtsberger, Rembt, Fischer, Vierling, Eberlin, et, dans les temps les plus rapprochés de nous, Knecht et* Rink.-La musique d’église à. grand orchestre rivalise avec celle de l’Italie : les Bach, Haendel, Joseph et Michel Haydn, Graun, Naumann, Mozart, etc., ont écrit une multitude de messes, de vèpres, de’Te Deum, de motets et d’antiennes. Les compositeurs allemands ont même surpasse.les musiciens des autres pays dans le genre de Poratorio : le Jllessie, Judas Machabée, Samson, Josué, .lephté et Athalie de Handel. les Hébreuw dans le désert et l’/ascension de Ch.-Phil.-Emm. Bach, la Passion de Graun, David pénilent de Mozart, la Création, les Saisons, et les Sept paroles de J.-C. de J. Haydn, sont des modèles inimitables..

La musique instrumentale est véritablement une création de l’Allemagne. Des pièces innombrables, sara« bandes, courantes, gigues, allemandes, etc., généralement écrites a 5 ou 6 parties pour les différentes espèces de violes et le clavecin ou l’orguè, précédèrent les compositions régulières du xvxu° siècle. Alors Kobrich, Agrel, Janitsch, Radeker, Camerloher et Abel créérent le style du trio, du quatuor et du quintette ; Krafft, Kürtzinger, Telemann, Schwindel, Misliwetzeck, s’essayèrent dans la symphonie a grand orchestre. Les formes instrument ales furent ensuite perfectionnées par Toesky, Wagenseil, Wanhall et Stamitz ; enfin Joseph Haydn, par ses quatuors et ses symphonies, assura à la musique instrumentale le rôle élevé qu’elle remplit aujourd’hui ; il semble avoir fixé le genre, et, malgré le développement qu’on a donné depuis aux effets d’orchestre, il a laissé fort peu de chose a faire à ses successeurs, même à Mozart. - A la même époque, de grands théoriciens développaient les principes de l’art : Fux écrivait son Gradus ad Parnassum, Marpurg son Histoire de la musique, et Kirnherger son Système d’harmonie.’Mattheson, Forkel, Albrechtsberger, Chladni, Gerber, et plus de 500 auteurs didactiques inondèrent l’Allemagne d’écrits théoriques et polémiques. ’ ’

Quant à la musique dramatique, elle date du xvn° siècle. En 1627, Opitz traduisit de Pitalien enjallemaud la Daplmó de Rinuccini, et Henri’Schütz, maître de chapelle de l’électeur de Saxe, mit en musique cet opéra, qui fut représenté sur le théâtre de Dresde. En 1678, Thiel, maître de chapelle à. Hambourg, fit exécuter un autre opéra de sa composition, intitulé Orontesf En 1692, un théâtre lyrique ayant été établi dans cette ville, Reinhard Keiser en fut le directeur et le compositeur olticiel, et écrivit 118 opéras, qui l’ont fait regarder avec raison comme le père de la musique dramatique en Allemagne. Les chanteurs étaient alors presque tous des marchands ou des artisans, alternativement occupés à la boutique et a la scène. Pendant le xvm° siècle, la prospérité du théâtre de Hambourg fut soiitenue par Mattheson, par Telemann, et surtout par Hœndel, dont les œuvres étaient ensuite transportées sur les théâtres de Dresde, de Vienne et do Berlin.- Le style grand et. pur, mais austère, de Haendel. et sa science profonde, excitaient l’admiration des artistes et des amateurs instruits, mais ne captivaient guère le public que la mode attirait au théâtre. Les préférences des spectateurs s’attachaient aux pièces composées dans un style plus léger et dans la manière de l*école ita ; lienne. L’empereur Léopold I§ ’, et, à son exemple, les cours de Munich, de Stuttgard, de Manheim, avaient établi des théâtres italiens, peuplés de compositeurs et d’artistes étrangers. L’école allemande se modilia. pour adopter le style plus tendre, plus passionné de l’école rivale. Tel est le caractère des ouvrages dramatiques de Graun, de J.-F. Agricola et de Hasse. La gloire de ce dernier, contre laquelle ne purent lutter ni Ditters ni Schrœter, fut pourtant éclipsée par Gluck, qui apportait à la